La question du report des voix entre les deux tours des élections est souvent primordiale pour les politologues et les journalistes politiques, afin de mieux comprendre les rapports de force entre les candidats. En effet, les candidats non qualifiés donnent ou non des consignes de vote, ou ont des proximités politiques plus ou moins claires avec un des candidats qualifiés pour le second tour. Nous allons essayer d’aborder cette question en regardant les deux tours de l’élection présidentielle française de 2012.
Beaucoup des analyses de “report de voix” utilisent des données des enquêtes réalisées à la sortie des urnes (donc construites par sondage, voir par exemple cet article de Slate). Ces enquêtes peuvent présenter certains inconvénients, et nous allons choisir ici une approche un peu différente, en analysant le vote pour chacune des villes et en établissant un modèle d’apprentissage très simple. Les données relatives au vote pour chacune des villes sont disponibles sur data.gouv, le site d’Open Data du gouvernement.
Le principe du modèle est d’essayer de prédire, ou d’expliquer, le vote au deuxième tour à partir des pourcentages de votes exprimés au premier tour. Ici, nous allons tout simplement faire tourner un modèle linéaire sur ces variables ville par ville afin de voir quelles tendances de report émergent. On utilise pour cela la fonction lm, classique en R. Les résultats sont les suivants :
Hollande | Sarkozy | |
Joly | 72 % | 22 % |
Le Pen | 18 % | 6 % |
Sarkozy | < 1 % | 115 % |
Melenchon | 94 % | < 1 % |
Poutou | 78 % | 3 % |
Artaud | 74 % | 4 % |
Cheminade | 32 % | 53 % |
Bayrou | 28 % | 59 % |
Dupont-Aignan | 20 % | 62 % |
Hollande | 114 % | < 1 % |
Les résultats sont plus lisibles si on s’aide d’un petit graphique :
Gardons à l’esprit qu’il s’agit seulement d’un modèle (fruste, qui plus est), donc cela ne veut pas dire que 4% des électeurs d’Artaud ont voté pour Sarkozy au deuxième tour (qui sait ?). L’analyse reste intéressante. Quelques premières remarques qui me viennent à la lecture :
- La somme des pourcentages donne une idée des électeurs qui n’ont pas souhaité participer au second tour. C’est particulièrement marqué pour les électeurs de Le Pen ;
- Il semblerait que le choix de Bayrou en 2012 de soutenir le candidat Hollande n’ait pas eu un impact si important que ça sur son électorat ;
- Le vote Mélenchon n’est pas si éloigné que ça du vote Hollande, en tout cas en termes de choix au second tour.
On peut aussi considérer ces données en nombre absolu de votes :
Sur ce graphique, on voit mieux que Hollande possédait plus de réserves de voix en 2012 que Sarkozy.
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